L’Agenda 2030 pour le développement durable sert de cadre au niveau international pour relever les grands défis de la planète. La Suisse s’engage en faveur de la mise en œuvre de ce programme tant au plan national qu’international et définit ses priorités dans la Stratégie pour le développement durable 2030.
En un coup d’œil
- En 2015, avec l’Agenda 2030, les Nations Unies se sont accordées sur un cadre global pour agir de manière coordonnée et avec des objectifs communs contre la pauvreté, les inégalités sociales et le changement climatique.
- L’Agenda 2030 se concentre sur 17 objectifs de développement durable, les ODD (Sustainable Development Goals).
- Un développement durable n’est possible que si les écosystèmes sont en mesure d’accomplir sur le long terme leurs tâches, l’efficacité économique est assurée et la solidarité sociale garantie.
- Le Conseil fédéral a fixé trois priorités d’ici à 2030 : la consommation et la production durables, les questions climatique, énergétique et de la biodiversité, ainsi que l’égalité des chances et cohésion sociale.
Les grands défis de la communauté internationale, tels que la pauvreté, les inégalités sociales, les changements climatiques, le recul de la biodiversité, la destruction de l’environnement, les crises sanitaires ou la mise en place d’une économie verte, ne sauraient être surmontés par les États de manière isolée. Une collaboration internationale efficace et une action coordonnée au plan mondial avec des objectifs communs et des mesures concertées, tant à l’échelle nationale qu’internationale, est nécessaire. En 2015, les Nations Unies se sont dotées de ce cadre global en adoptant l’Agenda 2030 pour le développement durable (Nations Unies). Ce programme résulte de la fusion des processus des conférences des Nations Unies sur le développement durable et des objectifs du millénaire pour le développement, lesquels ont pris fin en décembre 2015. Il couvre ainsi un large éventail de la durabilité et ouvre la voie vers un monde durable.
L’Agenda 2030 s’articule autour de 17 objectifs de développement durable (ODD, Sustainable Development Goals, SDG) qui permettent de guider l’action de la communauté internationale à l’horizon 2030 en vue de garantir un développement durable. Ces objectifs servent de repères dans tous les domaines essentiels de la vie, tels que l’alimentation, la santé, la formation, l’économie, l’énergie, le climat, l’environnement et une bonne gouvernance. Les Nations Unies prévoient de les concrétiser d’ici à 2030 de manière à permettre à chacun, aujourd’hui comme demain, de bénéficier d’une bonne qualité de vie et mener une existence digne.
Forte d’une longue tradition humanitaire et d’une économie solidement intégrée au niveau international, la Suisse a tout intérêt à l’avènement d’un tel monde. C’est pourquoi elle a activement participé à l’élaboration de l’Agenda 2030 et entend jouer un rôle de premier plan dans la mise en œuvre de celui-ci.
Conditions nécessaires pour un monde durable
Mais qu’entend-on précisément par développement durable ? Le Conseil fédéral le conçoit comme suit : « Un développement durable rend possible la satisfaction des besoins essentiels de toutes les personnes et assure une bonne qualité de vie partout dans le monde, aujourd’hui et à l’avenir. Il prend en considération les trois dimensions – responsabilité écologique, solidarité sociale et efficacité économique – de manière équivalente, équilibrée et intégrée, tout en tenant compte des limites des capacités des écosystèmes mondiaux. » (Conseil fédéral 2021a, p. 5).
Le développement durable a comme fondement la garantie d’une bonne qualité de vie pour tous. Pour y parvenir, certaines conditions doivent être réunies. Celles-ci sont définies dans le cadre des trois dimensions du développement durable :
- Premièrement, nous devons assumer notre responsabilité écologique. En d’autres termes, nos activités ne doivent pas dépasser les capacités de régénération des écosystèmes naturels. Il s’agit de garantir que les écosystèmes soient en mesure d’accomplir sur le long terme leurs tâches (comme la mise à disposition d’eau fraîche ou d’air pur). Nous pouvons ainsi garantir que la société fonctionne dans les limites de tolérance de la planète et que le patrimoine naturel reste sauvegardé à l’avenir.
- Deuxièmement, l’efficacité économique doit être assurée. L’économie doit reposer sur des bases solides afin d’être efficace, productive, résiliente et innovante. En outre, il s’agit de préserver durablement le capital économique (capital réel, capital financier, capital humain, capital social et capital naturel), permettant à chaque personne d’accéder à un niveau de vie avec des conditions matérielles suffisantes pour mener une existence agréable.
- Troisièmement, il convient de garantir une solidarité sociale, qui consiste à favoriser le respect de la dignité de chaque être humain, le respect des droits de l’homme, le libre épanouissement de la personnalité, la répartition équitable des richesses, la sécurité sociale et les relations d’égal à égal entre toutes les personnes. Il s’agit de garantir que tous les êtres humains puissent faire partie intégrante de la société (inclusion), que la justice soit la même pour tous et que les tensions sociales soient réduites autant que possible.
De nombreux ODD en cours de réalisation pour la Suisse
Les conditions sont-elles déjà réunies en Suisse ? La Suisse est-elle bonne élève en matière de développement durable ? Si l’on observe la crise actuelle liée au Covid-19, le bilan est positif malgré un contexte plus difficile concernant de nombreux ODD. Grâce à un système de santé flexible et de grande qualité, toutes les personnes atteintes de Covid-19 ont pu être prises en charge (ODD 3 – « Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge »). Avec notre système de protection sociale bien rodé, la plupart des gens ne se sentent pas menacés dans leur existence malgré les pertes économiques importantes qu’ils ont subies (ODD 1 – « Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde »). Notre système économique innovant et propice aux investissements constitue la base idéale pour la reprise économique actuelle (ODD 8 – « Promouvoir une croissance économique soutenue, partagée et durable, le plein emploi productif et un travail décent pour tous »). Par ailleurs, un État de droit fortement ancré protège la population contre des restrictions disproportionnées des droits fondamentaux (ODD 16 – « Promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes aux fins du développement durable »). Enfin, un système politique fondé sur la solidarité nous préserve des tensions dangereuses pouvant surgir au sein de la société (ODD 10 – « Réduire les inégalités dans les pays et d’un pays à l’autre »).
Réalisation des ODD: La Suisse est 16e au classement mondial
La Suisse a toutefois encore d’énormes progrès à faire dans certains domaines en vue d’atteindre les ODD : la biodiversité continue de décliner, d’où une moindre résilience de l’environnement naturel et donc une diminution des services écosystémiques tels que la pollinisation par des insectes (ODD 15 – « Préserver et restaurer les écosystèmes terrestres, en veillant à les exploiter de façon durable, gérer durablement les forêts, lutter contre la désertification, enrayer et inverser le processus de dégradation des sols et mettre fin à l’appauvrissement de la biodiversité »). Les énergies fossiles représentent aujourd’hui encore 63 % de l’approvisionnement en énergie (état en 2019), ce qui nous rend dépendants sur le plan énergétique et donne lieu à des émissions élevées de gaz à effet de serre (ODD 13 – « Prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions »). En outre, 42 % de la population souffre de surcharge pondérale ou d’obésité (état en 2017), une tendance croissante qui peut être à l’origine de nombreuses maladies (ODD 3). Par ailleurs, les chances sont inégalement réparties ; par exemple, le revenu des 20 % des personnes les plus riches de la population est plus de 40 fois supérieur à celui des 20 % des personnes les plus pauvres (ODD 10).
Malgré ces différents enjeux, la Suisse est relativement bien positionnée en comparaison internationale. Selon le rapport sur le développement durable 2021 (Sustainable Development Report 2021) du Réseau de solutions pour le développement durable (SDSN) et de la Fondation Bertelsmann (Sachs et al. 2021) , elle pointe à la 16e place sur 165 au classement mondial concernant la réalisation des ODD (la Finlande est en tête et l’Allemagne occupe le 4e rang).
Priorités du Conseil fédéral d'ici 2030
Après avoir adopté l’Agenda 2030, le Conseil fédéral a dressé un état des lieux afin d’identifier les domaines où il est urgent d’intervenir en vue d’atteindre les ODD. Sur la base de cette analyse, il a défini dans sa Stratégie pour le développement durable 2030 trois priorités qu’il entend renforcer d’ici 2030 : « consommation et production durables », « climat, énergie et biodiversité » et « égalité des chances et cohésion sociale ». Pour ce qui est de la consommation et de la production, l’utilisation élevée des matières premières constitue l’un des thèmes prioritaires. Elle s’élève en Suisse à quelque 17 tonnes par personne et par année. Une part importante des matières premières est importée de l’étranger. L’impact généré à l’étranger de la charge écologique liée à la consommation atteint lui aussi un niveau élevé, puisqu’il dépasse 70 % (Frischknecht et al. 2018, S. 40). Afin de promouvoir des modes de consommation et de production durables, le Conseil fédéral entend notamment renforcer l’économie circulaire et améliorer la transparence tout au long de la chaîne de valeur.
S’agissant de la deuxième priorité (climat, énergie et biodiversité), l’accent est mis notamment sur la lutte contre les changements climatiques. Depuis le début des relevés en 1864, la température annuelle moyenne a augmenté de 2° C dans notre pays, soit deux fois plus que dans le reste du monde. Les répercussions sont de plus en plus importantes pour la biodiversité, dont la situation est déjà très insatisfaisante en raison de la pression exercée par les activités humaines. C’est pourquoi le Conseil fédéral a décidé de renforcer son action dans les deux domaines. L’un des principaux axes consiste à diminuer de moitié les émissions indigènes de gaz à effet de serre à l’horizon 2030. D’ici 2050, la Suisse ne devrait plus rejeter de gaz à effet de serre, atteignant ainsi la neutralité carbone.
Diminution de la pauvreté et renforcement de la cohésion sociale
S’agissant de la troisième priorité de la Stratégie pour le développement durable 2030, le Conseil fédéral met l’accent notamment sur la diminution de la pauvreté. Bien qu’il n’y ait plus de pauvreté absolue en Suisse, environ 8,7 % de la population résidante permanente était affectée par la pauvreté en termes de revenu en 2019. La situation des enfants et des jeunes qui grandissent dans des familles affectées ou menacées par la pauvreté est particulièrement précaire. Cela influe en particulier également sur leurs chances de formation, leur autodétermination et leur libre arbitre par rapport à leur propre vie. À cet égard, les personnes plus défavorisées ainsi que celles issues de l’immigration subissent des inégalités palpables. C’est la raison pour laquelle le Conseil fédéral entend prévenir et combattre la pauvreté, tout en encourageant l’intégration sociale et professionnelle (cf. Wissler, Bernhard, L’atelier rollaid : du rebut au renouveau). Il soutient les cantons, les villes et les communes ainsi que les acteurs de la société civile dans leurs efforts visant à poursuivre la prévention et la lutte contre la pauvreté et met à disposition les informations nécessaires concernant l’évolution de la pauvreté ainsi que les mesures de prévention et leurs effets (cf. Luisier Rurangirwa, Géraldine, L’OFAS participe à la mise en œuvre de l’Agenda 2030). Un autre champ d’action du Conseil fédéral porte sur le renforcement de la cohésion sociale. L’individualisation des styles de vie, les disparités régionales ou les questions de répartition intergénérationnelle constituent un défi de taille pour la cohésion de la population suisse. Mais il y a également lieu de combattre les discriminations fondées, par exemple, sur l’origine, la langue, la couleur de peau ou la situation sociale. De concert avec les cantons, le Conseil fédéral tient compte de ces enjeux et entend mettre en œuvre des mesures afin d’encourager la création de liens sociaux (cf. Uehlinger/Karnusian, Des tables rondes faciles d’accès par et pour les migrantes et les migrants), la participation politique, l’engagement bénévole et la compréhension mutuelle. Il a également pour objectif, notamment, de renforcer la cohésion sociale dans les quartiers et les agglomérations (cf. Alder et al., Développement urbain durable dans le canton de Bâle-Ville).
Un cycle quadriennal pour le développement durable
La mise en œuvre de l’Agenda 2030 est un processus extrêmement dynamique qui est influencé par de nombreuses évolutions sur le plan tant national qu’international. La crise actuelle liée au Covid-19 en est le meilleur exemple. C’est la raison pour laquelle la politique du Conseil fédéral en matière de développement durable suit un rythme quadriennal. Ce dernier se fonde sur le programme de la législature et comporte quatre étapes. Au début du programme de la législature, un nouveau plan d’action (Conseil fédéral 2021b). est adopté dans le cadre de la Stratégie pour le développement durable 2030. Dans un deuxième temps, ce plan est mis en œuvre par les services fédéraux compétents. À noter que la Confédération encourage son application non seulement au niveau des cantons, des villes et des communes, mais aussi par la société civile ainsi que par les milieux scientifiques et économiques. Dans une troisième étape, il s’agit de mesurer les progrès ou les revers enregistrés par rapport à la réalisation des objectifs (cf. Savary, Medea et al., MONET 2030 : mesurer le développement durable en Suisse). Enfin, un rapport rend compte à l’ONU des défis qui subsistent. L’idée est de mettre en place un processus dynamique permettant une mise en œuvre flexible et efficace des ODD.
Le développement durable est une tendance de fond
Fin 2019, l’ONU a instauré la « décennie d’action » afin d’accélérer les efforts entrepris pour atteindre les ODD. Quelques mois plus tard seulement, la crise liée au Covid-19 a compliqué sensiblement la réalisation de certains objectifs comme la fin de la pauvreté sous toutes ses formes. Toutefois, il y a des raisons d’être optimiste : le développement durable est aujourd’hui plus que jamais une tendance de fond, que ce soit auprès des consommateurs, des entreprises, des instituts financiers ou des acteurs politiques. Ne dit-on pas que l’union fait la force ? La « décennie d’action » dure encore neuf bonnes années.
Bibliographie
Office fédéral du développement territorial ARE (2021). Agenda 2030 (site Internet)
Conseil fédéral (2021a). Stratégie pour le développement durable 2030; Berne: ARE].
Conseil federal (2021b). Plan d’action 2021-2023 relatif à la Stratégie pour le développement durable 2030;[Berne: ARE].
Sachs, Jeffrey, D. et al. (2021). Sustainable Development Report 2021, Cambridge.
Frischknecht, Rolf et al. (2018). Empreintes environnementales de la Suisse. De 1996 à 2015 ; [Berne: Office fédéral de l’environnement OFEV].
Nations Unies (2015). A/RES/70/1 Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Résolution adoptée par l’Assemblée générale le 25 septembre 2015.