En un coup d’œil
- La statistique « Parcours dans le système de sécurité sociale » (SHIVALV) présente des données conjointes de trois importantes prestations sociales suisses : l’assurance-chômage, l’assurance-invalidité et l’aide sociale.
- La majorité des personnes entrées dans le système SHIVALV en 2020 en sont sorties au cours des deux années suivantes.
- Seuls 6% des bénéficiaires ont reçu plus d’une prestation du système SHIVALV au cours de la période d’observation.
La statistique « Parcours dans le système de sécurité sociale » est appelée ci-après SHIVALV, en référence à la contraction en allemand de trois prestations sociales (SH = Sozialhilfe = aide sociale, IV = Invaliditätsversicherung = assurance-invalidité, ALV = Arbeitslosenversicherung = assurance-chômage). Elle a notamment l’avantage de compter le nombre de personnes au bénéfice de plus d’une de ces trois prestations, mais également de connaitre les transitions entre ces prestations.
Cette statistique est basée sur les données émanant de l’Office fédéral de la statistique (OFS) pour l’aide sociale, de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et de la caisse de compensation (CdC) pour les bénéficiaires d’une rente de l’assurance-invalidité (AI), et du secrétariat d’état à l’économie (SECO) pour les bénéficiaires d’indemnités journalières de l’assurance-chômage. Additionnellement, les données de STATPOP (OFS) sont utilisées pour savoir si les personnes observées ont immigré ou émigré avant ou après la perception d’une prestation, et celles des comptes individuels (CI) de la CdC permettent de renseigner sur le fait d’exercer ou non une activité rémunérée. Tous les résultats de cette statistique peuvent être consultés sur le site de l’OFS Analyses relatives au système de la sécurité sociale.
SHIVALV est considéré comme un système au sens scientifique et non administratif du terme. En effet, les inscriptions et suivi des dossiers des trois prestations qui forment le système SHIVALV ne sont pas centralisés. De même, les organes responsables diffèrent dans les trois prestations : les services sociaux des communes pour l’aide sociale, les offices régionaux de placement (ORP) cantonaux pour l’assurance-chômage et les offices AI cantonaux pour l’assurance-invalidité.
Moins de deux ans dans le système SHIVALV pour une majorité de bénéficiaires
Il existe différents types de trajectoires dans le système SHIVALV. Pour présenter les tendances les plus importantes dans ces trajectoires, nous observons toutes les personnes qui sont entrées dans SHIVALV en 2020, c’est-à-dire qu’elles ont perçu au moins une des prestations décrite ci-dessus pendant au moins un mois au cours de l’année 2020 alors qu’elles n’avaient perçu aucune de ces prestations durant douze mois avant cette entrée. Ce groupe représente un peu plus de 228’000 personnes. Nous suivons ces personnes pendant deux ans pour observer si elles continuent à percevoir cette prestation et si oui pendant combien de temps, si elles perçoivent plusieurs prestations l’une après l’autre ou en même temps, ou si elles ne perçoivent plus aucune des trois prestations du système SHIVALV.
Impact de la pandémie de Covid-19
Les personnes entrées dans le système SHIVALV en 2020 l’ont fait, pour la plupart, dans un contexte de Covid qui a impacté le marché du travail et les raisons de sortie de celui-ci. En conséquence, il y a eu plus d’entrées en 2020 que durant les années précédentes (+24% entre 2019 et 2020), en particulier celles vers les indemnités journalières de l’assurance-chômage (+28%). Le système de protection sociale a réagi en augmentant la durée maximale des indemnités-journalières de l’assurance-chômage, ce qui a entrainé de plus longs épisodes dans cette prestation. Pour ces raisons, la cohorte des bénéficiaires de SHIVALV entrés dans ce système en 2020 se caractérise, en comparaison à la situation avant Covid, d’une part par une augmentation du nombre de bénéficiaires d’indemnités journalières de l’assurance-chômage en 2020 et 2021 (+14% par rapport à 2019), et d’autre part par des entrées plus rares à l’aide sociale en 2021 (-11% par rapport à 2019).
La première observation est que la majorité des personnes qui sont entrées dans le système SHIVALV en 2020 en sont sorties au cours des deux ans suivant leur entrée. Près de 50% des bénéficiaires entrés en 2020 ne perçoivent plus de prestation après un an déjà, et cette part s’élève à environ deux tiers après deux ans (voir graphique 1).
Si l’on s’intéresse ensuite au nombre de prestations perçues, on observe que plus de 9 personnes sur 10 ne perçoivent qu’une des trois prestations du système SHIVALV (aide sociale, rente de l’AI ou indemnité journalière de l’assurance-chômage) durant les deux ans observés. Le plus souvent, il s’agit d’un épisode unique, c’est-à-dire que la personne perçoit une prestation durant un certain nombre de mois sans interruption (74% de tous les bénéficiaires observés). Pour environ 16% des bénéficiaires, une même prestation est perçue durant les deux ans observés mais avec une interruption (d’au moins 2 mois) puis un retour dans cette prestation, et pour 3% il y a au moins deux interruptions.
Seuls 6% des bénéficiaires perçoit plus d’une prestation du système SHIVALV durant la durée d’observation. La dynamique de la perception de ces prestations est stable dans la majorité des cas, c’est-à-dire que les deux ou trois prestations sont perçues pour un certain nombre de mois sans interruption. A l’inverse, les cas de personnes percevant plusieurs prestations et connaissant une interruption puis un retour dans une ou plusieurs de ces prestations sont minoritaires. Ce type de profil est parfois comparé à un « effet de porte tournante », et nous observons que ce type de trajectoire ne représente que 2% de tous les bénéficiaires.
L’assurance-chômage concerne 80% des bénéficiaires
Une variété existe au sein des trajectoires dans le système SHIVALV, qui est due aux différentes dynamiques des trois prestations. Les bénéficiaires de l’assurance-chômage sont plus nombreux mais perçoivent cette prestation en moyenne moins longtemps, alors que les bénéficiaires d’une rente de l’assurance-invalidité sont moins nombreux mais perçoivent plus longtemps cette prestation. Les bénéficiaires de l’aide sociale se situe entre ces deux dynamiques. Les paragraphes ci-dessous présentent plus en détail les tendances pour chaque prestation.
Près de 82% des bénéficiaires entrés dans le système SHIVALV en 2020 ont perçu une indemnité journalière de l’assurance-chômage durant au moins un mois (voir graphique 2). Environ 77% des bénéficiaires n’ont perçu que cette prestation, alors que 6% ont perçu cette prestation ainsi qu’au moins une des deux autres. Parmi les 77% qui ont perçu l’assurance-chômage uniquement, la majorité a perçu cette prestation durant un épisode unique (c’est-à-dire sans interruption). Cet épisode a duré moins de 6 mois pour environ un tiers des bénéficiaires de cette assurance, entre 6 et 12 mois pour 19%, et plus d’un an pour un peu moins d’un quart d’entre eux. 6% des bénéficiaires de l’assurance-chômage entrés dans le système SHIVALV en 2020 ont connu une arrivée en fin de droit. Finalement, environ un quart des bénéficiaires d’une indemnité journalière de l’assurance-chômage uniquement a perçu cette dernière avec une interruption (19%) ou deux interruptions et plus (4%). Les interruptions sont comptabilisées lorsque celles-ci durent au moins 2 mois.
Environ un bénéficiaire sur 5 est concerné par l’aide sociale : pour 13% des bénéficiaires entrés dans le système SHIVALV en 2020, seule l’aide sociale est perçue durant la période observée alors que pour 6% des bénéficiaires, l’aide sociale a été perçue avec au moins une autre prestation. Les épisodes plus longs sont plus fréquents parmi les bénéficiaires de l’aide sociale uniquement : 56% ont perçu cette prestation pendant un épisode unique de plus d’un an, 14% durant un épisode de 6 mois à 1 an et 19% pendant un épisode de moins d’un an. Environ 10% des bénéficiaires de l’aide sociale uniquement ont perçu cette prestation avec une interruption d’au moins deux mois puis un retour, alors que les cas de retours multiples (deux interruptions ou plus) sont très rares (moins de 0.5% des cas).
Les rentes de l’assurance-invalidité concernent la plus petite part des bénéficiaires avec seulement 6% du total des bénéficiaires entrés dans le système SHIVALV en 2020. Environ 5% ont perçu seulement une rente AI et 2% la combinaison d’une rente AI et d’au moins une autre prestation du système SHIVALV. La dynamique des bénéficiaires d’une rente AI est souvent une perception de longue durée, sans interruption. Ainsi, 80% des bénéficiaires d’une rente AI qui ont commencé à percevoir cette rente en 2020 étaient encore au bénéfice de cette rente deux ans après, sans interruption ni autre prestation. Les principales raisons de ne plus percevoir une rente AI sont l’arrivée à l’âge de la retraite – moment où le droit à une rente AI prend fin, et est souvent remplacé par une rente de l’assurance-vieillesse ainsi que des prestations complémentaires en cas de besoin – ou le décès.
Assurance-chômage et aide sociale combinées
La combinaison de prestations la plus courante dans le système SHIVALV est celle entre les indemnités journalières de l’assurance-chômage et l’aide sociale. 5% des bénéficiaires entrés dans le système SHIVALV en 2020 étaient concernés par cette combinaison, c’est-à-dire qu’ils ont perçu durant les deux ans après leur entrée les deux prestations, ensemble ou l’une après l’autre. Pour un peu plus de la moitié d’entre eux, la dynamique était stable, c’est-à-dire qu’ils ont perçu chacune des deux prestations durant un certain nombre de mois sans interruption ni allers-retours. En revanche, pour une petite moitié des personnes qui ont perçu durant les deux ans observés à la fois une indemnité journalière de l’assurance-chômage et une prestation de l’aide sociale, il y a eu une sortie puis un retour dans la prestation pour au moins une des deux prestations.
La statistique « Parcours dans le système de sécurité sociale » (SHIVALV) est établie et publiée par l’Office fédéral de la statistique (OFS). Elle est accompagnée par l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) et développée en collaboration avec l’OFS. Les auteurs remercient le SECO pour la relecture attentive de cet article et son regard expert.