La tendance est claire : le résultat de répartition de l’AVS passera dans le rouge au cours de la prochaine décennie. Quand exactement, cela dépendra de l’évolution économique et démographique. Pour établir ses perspectives financières, l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) s’appuie sur différents scénarios.
L’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) établit chaque année des perspectives financières pour l’AVS. Cet instrument permet d’établir une projection plausible du développement des comptes de l’AVS pour la prochaine décennie. L’évolution des finances de l’AVS dépend fortement du développement de la démographie et de l’économie qui influencent l’évolution des cotisations, des recettes fiscales et du nombre de bénéficiaires. Pour calculer les perspectives financières, il faut donc tenir compte des scénarios démographiques et de différentes hypothèses relatives à la conjoncture. Ainsi, le décompte final de l’AVS pour une année n’est pas forcément identique au résultat qui avait été publié dans les perspectives financières de l’AVS des années auparavant. Cet article examine l’utilité d’établir des perspectives financières et propose une comparaison entre les perspectives publiées en 2011 et les décomptes finaux réalisés entre 2011 et 2019.
Sur quels paramètres se fondent les hypothèses ?
Pour effectuer les projections financières du développement à long terme de l’AVS, mais aussi des autres assurances sociales, l’OFAS doit retenir des hypothèses sur l’évolution démographique et économique. Celles-ci sont établies par divers groupes d’experts de la Confédération et servent de valeurs de référence pour de nombreuses autres questions traitées par l’administration fédérale, notamment le budget de la Confédération. Les valeurs concernant la démographie sont définies dans le cadre des scénarios démographiques de l’Office fédéral de la statistique (OFS) redéfinis tous les cinq ans par le groupe d’experts de l’OFS. Ces scénarios indiquent l’évolution probable de l’espérance de vie à la naissance et à l’âge de 65 ans, de la migration, de l’activité professionnelle ou encore de la fécondité, entre autres. Les hypothèses à long terme sur l’évolution économique – la croissance du PIB, le renchérissement annuel, la croissance des salaires – se fondent sur les évaluations de groupes d’experts de la Confédération pour les prévisions conjoncturelles, du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) et de l’Administration fédérale des finances (AFF). Les projections des recettes de la TVA sont élaborées par l’Administration fédérale des contributions (AFC).
Un système d’alerte
Les perspectives financières ne permettent pas de prédire l’avenir ni de dire exactement quel sera le décompte final de l’AVS dans dix ans. Leur but est d’indiquer la tendance de l’évolution des différentes variables, afin de montrer quelles répercussions cette évolution aura sur les finances de l’AVS pour la prochaine décennie. Ainsi, il est possible d’anticiper suffisamment tôt les défis auxquels l’assurance sera confrontée. Le Conseil fédéral est tenu par la loi de surveiller cette évolution et de proposer des mesures correctives. Il revient ensuite au Parlement, et finalement au peuple en cas de référendum comme c’est le cas pour AVS 21, de décider si ces mesures sont adéquates et souhaitables. C’est donc un système d’alerte précoce et non l’annonce d’un résultat spécifique.
Bien entendu, il est extrêmement difficile de savoir des années à l’avance comment la conjoncture et la démographie vont évoluer. Toutefois, l’OFAS établit ces perspectives avec le plus grand soin, conformément aux estimations les plus récentes des experts sur l’évolution future de la conjoncture, des salaires, du renchérissement, de l’immigration, etc. La méthodologie utilisée a été remaniée il y a une dizaine d’années, puis vérifiée et validée par des experts externes. Malgré tout, des incertitudes et des risques demeurent, et si l’on compare les résultats des comptes de l’AVS pour une année aux perspectives établies dix ans auparavant pour cette même année, il est normal que les chiffres diffèrent. S’il reste très difficile d’anticiper les mouvements de la conjoncture et les effets de la migration, il demeure utile d’établir des projections pour dix ans. Elles livrent des informations fiables sur l’équilibre financier de l’AVS, même si la qualité des hypothèses sur la démographie et l’économie est déterminante.
Les perspectives sont fiables
Si l’on compare les perspectives publiées en 2011 pour les dix années suivantes avec les décomptes finaux des années correspondantes, on peut constater que les prévisions et les résultats effectifs correspondaient généralement très bien (voir illustration 1). Les prévisions étaient même un peu trop optimistes – et non pas trop pessimistes, comme on le prétend souvent. L’écart entre les perspectives et les résultats réels de 2011 à 2019 est de 200 millions par an en moyenne – et ce pour un volume de dépenses de 41,6 milliards et de recettes de 41,1 milliards par an en moyenne.
Les écarts importants pour 2020 (–1,7 milliards) et 2021 (–3,2 milliards) ne sont pas dus à de mauvaises estimations, mais s’expliquent par la réforme fiscale et financement de l’AVS (RFFA) qui octroie un financement additionnel en faveur de l’AVS de plus de 2 milliards de francs par année. En 2011, les perspectives n’avaient bien entendu pas pu tenir compte de cet apport, décidé par le peuple en 2019.
Paramètres révisés suite au COVID-19
L’OFS établit les scénarios démographiques tous les cinq ans. Ainsi, les développements rapides et inattendus (par ex. mouvements migratoires, pandémies, avancées médicales…) ne sont pas immédiatement reflétés dans les perspectives financières de l’AVS. La pandémie, la guerre en Ukraine et les problèmes d’approvisionnement en énergie qui en découlent sont des exemples récents.
Très pessimistes au départ par rapport aux effets de la pandémie de COVID-19, les différents experts qui établissent les hypothèses pour l’économie ont par la suite revu leurs prévisions sur l’évolution conjoncturelle à la hausse, notamment aussi grâce au large éventail de mesures prises par l’Etat pour soutenir l’économie. Les perspectives financières sont actualisées chaque année. En mai 2022, l’OFAS a revu les perspectives financières jusqu’en 2032 pour tenir compte de ces hypothèses plus optimistes.
Les baby-boomers partent à la retraite
Les perspectives actuelles indiquent que les dépenses vont augmenter plus rapidement que les recettes (voir illustration 2). Certes, la réforme AVS 21 permet de repousser le moment où cela ne sera plus le cas, mais même les hypothèses les plus optimistes montrent qu’à terme, les recettes et les dépenses ne seront plus équilibrées.
La génération au taux de natalité le plus fort atteindra l’âge de la retraite en 2028 (voir vidéo). Ensuite, la taille des classes d’âge diminue à nouveau, mais reste à un niveau élevé, notamment parce que davantage de personnes immigrées arrivent à l’âge de la retraite. De plus, les retraités vivent en moyenne plus longtemps et perçoivent donc l’AVS sur une plus longue durée. Pour ces raisons, les comptes de l’AVS ne seront pas rééquilibrés avec la fin de la vague de retraités de la génération du baby-boom.
Cet article est tiré de la fiche d’information de l’OFAS sur la votation populaire fédérale du 25 septembre 2022 sur la réforme Stabilisation de l’AVS (AVS 21). Des informations supplémentaires sur la situation financière de l’AVS sont disponibles ici.