En un coup d’œil
- Le Conseil fédéral pourra déclarer certains points de l’accord de branche obligatoires.
- La réglementation déclarée de force obligatoire sera appliquée à tous les assureurs, même à ceux qui n’auraient pas adhéré à l’accord de branche.
- Les assureurs y contrevenant seront sanctionnés.
Les appels téléphoniques non désirés sont une source importante d’agacement pour la population en Suisse. Ils ont tendance à s’intensifier en automne à la période des changements de caisse-maladie en raison du démarchage de courtiers en assurances. Les commissions versées à ces intermédiaires font partie des coûts administratifs des assureurs et occupent en ce sens le Parlement depuis plusieurs années. Le projet de modification de la loi fédérale sur l’assurance-maladie de 2009 visant à endiguer l’évolution des coûts prévoyait d’interdire toutes les commissions d’assurance et le financement du démarchage téléphonique. Il a été rejeté par le Parlement, tout comme la motion « Pour mettre fin au démarchage téléphonique des assureurs-maladie » déposée en 2011.
En adoptant la loi sur la surveillance de l’assurance-maladie en 2014, le législateur a décidé de laisser les assureurs régler eux-mêmes l’activité des intermédiaires, en particulier leur rémunération et le démarchage téléphonique. Les deux associations faîtières de la branche Santésuisse et Curafutura ont conclu en 2015 un accord avec leurs membres. Cependant, l’un des accords n’a pas été signé par tous les membres et l’autre ne limitait pas le montant de la commission des intermédiaires.
Pressions du Parlement
En automne 2017, deux motions ont été déposées au Parlement pour donner au Conseil fédéral la compétence de régler la rémunération de l’activité des intermédiaires dans l’assurance-maladie sociale. Dans le cadre des débats relatifs à ces motions, les deux associations faîtières des assureurs ont annoncé qu’elles préparaient ensemble un nouvel accord réglementant l’activité et la rémunération des intermédiaires non seulement pour l’assurance-maladie sociale, mais également pour l’assurance-maladie complémentaire. Cet accord, conclu en janvier 2020, est entré en vigueur le 1er janvier 2021.
En parallèle, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des États a déposé en octobre 2018 la motion « Caisses-maladie. Réglementation contraignante des commissions versées aux intermédiaires, sanctions et garantie de la qualité » que le Parlement a adoptée en 2019.
Le projet de loi prévoyait que, sur requête des assureurs, le Conseil fédéral reçoit la compétence de déclarer obligatoires – dans le domaine de l’assurance-maladie sociale et dans celui de l’assurance-maladie complémentaire – les points de l’accord des assureurs concernant l’interdiction du démarchage téléphonique à froid (c’est-à-dire auprès de personnes qui n’ont jamais été assurées auprès de l’assureur concerné ou qui ne le sont plus depuis 36 mois), la formation et la limitation de la rémunération des intermédiaires ainsi que l’établissement et la signature d’un procès-verbal d’entretien de conseil. Le non-respect de ces points constitue une infraction inscrite dans la loi sur la surveillance de l’assurance-maladie ainsi que dans la loi sur la surveillance des assurances, et susceptible d’entraîner, en cas d’acte intentionnel, une amende de 100’000 francs au plus. La négligence est réprimée par une amende de 20’000 francs au plus dans l’assurance-maladie sociale et de 50’000 francs au plus dans l’assurance complémentaire.
Deux points d’achoppement
Les avis exprimés durant la consultation ont mis en évidence principalement deux points d’achoppement. D’une part, la définition de l’intermédiaire d’assurance a divisé les participants : certains ont soutenu la définition du Conseil fédéral qui englobe les employés des assureurs actifs dans la prospection de nouveaux assurés ; d’autres en revanche ont souhaité circonscrire cette définition aux personnes qui ne sont pas liées à un assureur par un contrat de travail. D’autre part, l’introduction de sanctions s’est heurtée à l’opposition des assureurs qui estimaient que le système prévu dans leur accord conclu en 2020 était suffisant.
Le Conseil fédéral a transmis son message au Parlement le 19 mai 2021. Les débats parlementaires se sont concentrés sur les deux points sensibles apparus dans le cadre de la consultation. Au final, le Parlement a adopté en décembre 2022 l’acte modificateur unique qui contient une révision de loi sur la surveillance de l’assurance-maladie et de la loi sur la surveillance des assurances. Le texte correspond au projet du Conseil fédéral auquel a été ajoutée l’obligation pour le Conseil fédéral d’auditionner les assureurs avant toute déclaration de force obligatoire.
Mise en œuvre de la loi
Avant l’entrée en vigueur de la loi, le Conseil fédéral doit encore préparer l’ordonnance contenant les dispositions d’exécution. Celle-ci devrait être mise en consultation prochainement. Elle contiendra la liste des points de l’accord de branche déclarés obligatoires ainsi que la définition des comportements qui constituent des infractions.
Par l’adoption de l’ordonnance, le Conseil fédéral déclarera les points en question obligatoires pour tous les assureurs. La requête de déclaration de force obligatoire devra émaner d’assureurs représentant au moins 66 % des assurés (dans l’assurance-maladie sociale) et 66 % des recettes de primes (dans l’assurance-maladie complémentaire).