En un coup d’œil
- Fin 2021, les fonds de prévoyance du pilier 3a se montaient à près de 142 milliards de francs.
- En raison de la baisse des taux d’intérêt réels, l’épargne-titres gagne du terrain.
- Si les produits de placement durables sont aujourd’hui la règle dans le pilier 3a, on observe des différences notables quant aux frais de gestion de fortune.
Le système suisse de prévoyance vieillesse, survivants et invalidité est fondé sur trois piliers : la prévoyance étatique, professionnelle et privée. Alors que les deux premiers piliers réunis doivent permettre de conserver le niveau de vie antérieur, le 3e pilier couvre des besoins individuels supplémentaires. Il se compose, d’une part, de la prévoyance individuelle non liée (pilier 3b), qui englobe tous les avoirs de prévoyance épargnés à titre volontaire. Constitués par des versements de n’importe quel montant, ces avoirs peuvent être retirés à tout moment. Le 3e pilier comprend, d’autre part, la prévoyance individuelle liée (pilier 3a), qui est au cœur du présent article.
L’assuré peut disposer de son avoir du pilier 3a au plus tôt cinq ans avant l’âge ordinaire de la retraite (âge de référence). Un retrait anticipé n’est possible qu’à des conditions bien précises : pour démarrer une activité professionnelle indépendante, pour accéder à la propriété d’un logement, pour effectuer des rachats du 2e pilier ou en cas de départ définitif de Suisse.
Actuellement, le montant annuel maximal que les salariés affiliés au 2e pilier peuvent verser sur leur pilier 3a est de 7056 francs. Les indépendants, quant à eux, peuvent verser sur leur pilier 3a jusqu’à 20 % de leur revenu (35 280 francs au maximum), à condition de ne pas être affilié à une institution de prévoyance. Les montants versés sur le pilier 3a sont fiscalement déductibles et, lors du retrait du pilier 3a, les assurés bénéficient d’un taux d’imposition réduit.
Fin 2021, selon la Statistique des assurances sociales suisses, les fonds de prévoyance du pilier 3a se montaient à près de 142 milliards de francs, dont environ 91 milliards étaient gérés par des banques et 51 milliards, par des assurances.
Un pilier 3a souscrit auprès d’une assurance inclut une couverture d’assurance en cas d’invalidité ou de décès, alors que ce n’est pas le cas pour un pilier 3a souscrit auprès d’une banque. Dans le cas de l’assurance, le montant de la prime n’est donc pas intégralement consacré à la prévoyance vieillesse. En revanche, un tel contrat offre une couverture d’assurance supplémentaire. Il prévoit également une durée fixe, ce qui implique que des versements réguliers doivent être effectués. Cependant, les contrats prévoient généralement la possibilité d’interrompre temporairement le versement des primes, ce qui augmente leur flexibilité.
L’analyse qui suit se limite aux offres des banques, qui sont conçues de manière relativement flexible et où le montant versé est entièrement consacré à la prévoyance vieillesse.
Solution d’épargne (compte)
Fin 2021, près de deux tiers des fonds du pilier 3a déposés dans des banques (au total quelque 59 milliards de francs) étaient constitués de dépôts d’épargne auprès d’un établissement bancaire. Cette solution d’épargne permet un versement volontaire jusqu’à concurrence du maximum annuel. Jusqu’à tout récemment, les taux d’intérêt étaient toutefois très bas en raison de la politique de taux d’intérêt négatifs menée par la Banque nationale suisse. Depuis la reprise de l’inflation, les taux d’intérêt nominaux ont légèrement progressé, mais pas au même rythme que l’inflation.
Au cours des quatre dernières années, le taux d’intérêt moyen était de 0,2 %, comme le montre une comparaison de 88 établissements présentée sur le portail Finpension (sans pondération du capital). Comparativement, selon l’Office fédéral de la statistique, l’inflation annuelle entre juillet 2019 et juillet 2023 a atteint, au total, 4,8 %. En termes réels, les assurés ayant opté pour cette solution d’épargne ont donc essuyé une perte sèche.
Actuellement, les taux d’intérêt ont tendance à remonter. À mi-2023, selon Finpension, le taux d’intérêt moyen des 88 établissements examinés s’élevait à 0,65 %. Fin juillet, l’inflation annuelle s’élevait à 1,6 %.
Depuis la fin des années 1980, les taux d’intérêt réels n’ont cessé de baisser, ce qu’illustrent, par exemple, les obligations de la Confédération (graphique 1).
Augmentation de l’épargne-titres
Conformément à la législation suisse sur les banques, l’argent destiné au pilier 3a peut également être placé sous forme de fonds du pilier 3a auprès d’une banque. Ces dernières années, les taux d’intérêt négatifs ont fortement accru la popularité de ces « solutions d’épargne » liées à des placements. Alors que, fin 2017, les fonds de placement du pilier 3a étaient estimés à 17 milliards de francs, fin 2021, ce chiffre était passé à quelque 32 milliards.
Quels sont les fonds 3a qui présentent les meilleures performances ? La diversité des stratégies adoptées d’un fonds à l’autre ainsi que l’hétérogénéité et l’incompatibilité des données rendent les comparaisons difficiles. L’analyse des indices permet d’estimer la performance des solutions de placement du pilier 3a.
Un bon exemple est l’indice « Pictet LPP 25 plus », composé de 65 % d’obligations, 10 % d’immobilier, 20 % d’actions et 5 % de placements alternatifs. Les indices « Pictet LPP 40 plus » et « Pictet LPP 60 plus » comportent des parts plus importantes d’actions et de placements alternatifs (voir tableau). L’indice « Pictet LPP 60 plus » est celui qui présente les risques de placement et les fluctuations les plus élevés.
Si l’on observe que les risques plus élevés ont été payants, du moins ces dernières années, cela ne constitue en aucun cas une garantie pour l’évolution future. Néanmoins, à condition d’être avisé et prêt à prendre des risques, on peut mettre à profit l’horizon de placement relativement lointain du pilier 3a pour effectuer des placements en conséquence. Mais – et c’est un point important – les assurés doivent décider, dans les dernières années avant le versement de leur capital, s’ils entendent réduire les risques. En effet, les fluctuations à court terme peuvent être considérables, surtout lorsque les parts d’actions (et de placements alternatifs) sont importantes.
Les assurés peuvent également combiner un fonds de placement comprenant une part élevée d’actions avec un compte du pilier 3a, ce qui leur permettra d’éviter les fluctuations de cours des obligations à taux fixe et, la plupart du temps, d’économiser des frais de gestion de fortune. Une telle combinaison (compte et fonds de placement) s’avère plutôt profitable en cas de hausse des taux d’intérêt, mais plutôt défavorable en cas de baisse, car les cours des obligations (selon leur durée) baissent en cas de hausse des taux et augmentent en cas de baisse.
Disparités importantes au niveau des frais d’administration
Les coûts des produits d’épargne-titres varient considérablement. La plupart du temps, les frais de gestion de fortune sont indiqués sous la forme standard du Total Expense Ratio (TER), qui englobe les principaux frais de gestion de fortune, mais exclut les frais de transaction au sein du fonds. Ces derniers sont en moyenne plutôt faibles : un calcul réalisé par l’auteur sur la base des indications des gestionnaires d’un échantillon de 22 fonds a abouti à une valeur de 0,06 %.
Pour certains véhicules de placement, ce n’est pas le TER qui est donné, mais plutôt une commission de gestion ou une autre indication similaire. L’analyse de 122 véhicules de placement montre de grandes disparités (graphique 2). Les frais annuels de gestion de fortune du fonds le moins cher s’élèvent à 0,24 % et ceux du plus cher à 1,76 %, pour une moyenne de 1,05 %.
On constate de grandes différences, au niveau des frais, entre les formes de placement gérées activement et celles qui sont gérées passivement. Pour les produits à gestion passive, l’indice est répliqué et la performance correspond grosso modo à l’indice (moins les frais non pris en compte dans l’indice). Pour les produits à gestion active, les gestionnaires de fortune cherchent à obtenir un rendement supérieur à celui de l’indice. Cependant, l’expérience montre que leurs tentatives sont souvent vouées à l’échec. Pour les 107 produits à gestion active, les frais de gestion prélevés sont en moyenne de 1,13 %, alors que pour les 15 produits à gestion passive, ils ne représentent que 0,49 %.
De plus, une commission d’émission est souvent prélevée et parfois aussi, même si c’est plus rare, une commission de rachat. Pour d’autres placements, il existe un écart entre le prix d’achat et le prix de vente. Ces coûts peuvent se chiffrer à plusieurs points de pourcentage. Toutefois, si les produits sont détenus à long terme, les coûts ici évoqués sont moins déterminants, à terme, que les frais annuels.
Pour l’épargne-titres du pilier 3a, il vaut donc la peine de comparer les coûts et les rendements, comme d’ailleurs pour tous les placements collectifs incluant des titres. L’assuré doit également être bien au clair aussi bien sur sa capacité de risque que sur sa propension à assumer des risques.
Tendance à la durabilité
La durabilité des fonds du pilier 3a compte de plus en plus. Dans le domaine des placements, on parle dès lors de critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance).
Encore l’exception il y a quelques années, les produits durables deviennent de plus en plus la règle. Les assurés disposent désormais d’un vaste éventail de fonds du pilier 3a : sur les 122 produits évalués, 95 affichent un rating de durabilité ou sont axés sur cet objectif. On observe toutefois des différences : alors que certains produits appliquent des critères très stricts, d’autres affichent un rating de durabilité plutôt bas.