En un coup d'œil
- Les personnes exerçant une activité indépendante ne sont pas obligatoirement assurées contre la perte de gain en cas d’accident ou de maladie professionnelle.
- Elles peuvent s’assurer à titre facultatif en vertu de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal), de la loi sur le contrat d’assurance (LCA) ou encore de la loi sur l’assurance-accidents (LAA).
- Des différences significatives existent toutefois entre l’assurance facultative et l’assurance obligatoire au sens de la LAA.
L’assurance-accidents est obligatoire en Suisse pour les personnes salariées. Elle les protège des conséquences économiques et sanitaires des accidents professionnels, non professionnels et des maladies professionnelles. Le catalogue des prestations comprend le remboursement des soins et d’autres frais ainsi que les prestations dites en espèces (rentes par exemple).
Les personnes exerçant une activité indépendante ne font pas partie du cercle des personnes obligatoirement assurées, défini dans la loi sur l’assurance-accidents (LAA). Elles sont certes également assurées contre les accidents par l’assurance obligatoire des soins selon la loi sur l’assurance-maladie (LAMal), mais cette assurance ne couvre que les frais de guérison et non la perte de gain.
Selon la jurisprudence, est réputé « travailleur occupé » au sens de la LAA, donc obligatoirement assuré, quiconque, dans un but lucratif ou de formation et sans devoir supporter de risque économique propre, exécute durablement ou provisoirement un travail pour un employeur, auquel il est plus ou moins subordonné.
La LAA définit également le cercle des personnes pouvant s’assurer à titre facultatif et à quelles conditions. Quiconque exerce une activité lucrative indépendante et est domicilié en Suisse, ainsi que les membres de sa famille qui collaborent à l’entreprise, peut s’assurer à titre facultatif, s’il n’est pas déjà assuré à titre obligatoire.
Assurance facultative d’indemnités journalières
Trois possibilités s’offrent aux personnes de condition indépendante pour assurer leur perte de gain potentielle en cas d’accidents ou maladies professionnelles : premièrement, la LAMal comprend, en plus de l’assurance obligatoire des soins, l’assurance facultative d’indemnités journalières. Celle-ci constitue une branche d’assurance distincte, considérée comme une assurance sociale au sens de la loi sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA). Tout assureur au bénéfice de l’autorisation de pratiquer l’assurance-maladie est tenu de pratiquer aussi l’assurance individuelle d’indemnités journalières. Il se doit de conclure une telle assurance avec toute personne domiciliée en Suisse ou qui y exerce une activité lucrative, âgée de 15 ans révolus mais qui n’a pas atteint 65 ans, si celle-ci le demande. Il s’agit donc d’une obligation d’admission.
L’assurance d’indemnités journalières est, dans sa conception légale, une assurance perte de gain en cas de maladie et, subsidiairement, aussi en cas d’accident ou maternité. Le droit aux indemnités journalières prend naissance lorsque l’assuré a une capacité de travail réduite au moins de moitié. En cas d’incapacité de travail totale, les indemnités doivent être versées durant au moins 720 jours dans une période de 900 jours. Le montant de l’indemnité journalière assurée est convenu entre l’assureur et le preneur d’assurance. La loi ne prescrit pas de montant minimal. Les assureurs ne sont donc pas tenus de proposer aux intéressés une couverture d’assurance qui leur permette de couvrir la perte de gain prévisible en cas de maladie ou d’accident. En pratique, les assureurs prévoient des indemnités journalières d’un faible montant, raison pour laquelle la plupart des assurés de condition indépendante concluent une autre forme d’assurance d’indemnités journalières. Des chiffres précis sur le nombre d’affiliation ne sont toutefois pas disponibles.
Assurance perte de gain selon la LCA
La majorité des indépendants choisit la deuxième option : l’assurance d’indemnités journalières selon la loi sur le contrat d’assurance (LCA) de droit privé – ici aussi, le nombre précis d‘affiliations n’est pas connu. Outre des indemnités plus intéressantes, la LCA propose davantage de marge de manœuvre avec des contrats adaptés aux spécificités de chaque indépendant. Des entreprises d’assurance (au sens de la loi sur la surveillance des entreprises d’assurance), ainsi que certaines caisses-maladie peuvent pratiquer l’assurance selon la LCA. Cette assurance est régie par le principe de la liberté de contracter : il n’y a donc pas d’obligation d’admission.
Des réserves d’assurance pour les maladies existantes peuvent être instituées sans limite temporelle et certains risques de maladie peuvent être exclus. Le montant et la durée des prestations peuvent être convenus librement. La conclusion d’une police d’assurance a lieu en général sur la base d’un questionnaire sur l’état de santé et, le cas échéant, d’un examen médical.
Assurance facultative selon la LAA
Une troisième possibilité pour les personnes indépendantes est de s’affilier à l’assurance facultative de la LAA. Sous réserve de certaines limites (voir ci-dessous), l’assuré à titre facultatif a droit – aux mêmes conditions que l’assuré à titre obligatoire – à la perte de gain née de son incapacité de travail liée à un accident ou à une maladie professionnelle.
La perte de gain est ainsi comblée grâce à une convention signée entre l’assuré et l’assureur. Outre les indemnités journalières, l’assuré a aussi droit à toutes les autres prestations du catalogue prévu par la LAA. Plus grande prestataire de l’assurance facultative selon la LAA, la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents disposait en 2022 de plus de 9500 contrats de la sorte, correspondant à un volume de primes de 22 millions de francs, selon son rapport annuel.
Différences entre AA obligatoire et AA facultative
Le législateur a expressément prévu que les dispositions sur l’assurance-accidents obligatoire s’appliquent par analogie à l’assurance facultative de la LAA. Le principe de l’égalité de traitement s’applique donc entre personnes actives, qu’elles soient salariées ou indépendantes. La loi octroie toutefois au Conseil fédéral la compétence de réglementer l’adhésion à l’assurance facultative (limites du droit de s’assurer, fondement, début et fin du rapport d’assurance) ainsi que le calcul des primes et des prestations en espèce notamment. C’est dans l’ordonnance sur l’assurance-accidents (OLAA) que le Conseil fédéral a tenu compte des différences entre le statut d’indépendant et celui de salarié.
Dans l’assurance facultative, le rapport d’assurance se fonde sur un contrat écrit qui fixe notamment le début, la durée minimale et la fin du rapport d’assurance. Il s’agit d’un contrat d’assurance de droit public. L’assureur peut, pour des raisons fondées, notamment en cas d’atteintes à la santé préexistantes importantes et durables, refuser de conclure une assurance facultative. Le rapport d’assurance prend notamment fin à la cessation de l’activité lucrative indépendante ou par suite de résiliation ou d’exclusion.
Règles différentes pour fixer le gain assuré
Dans l’assurance obligatoire, il est prévu que le gain assuré pour le calcul des indemnités journalières est le dernier salaire perçu avant l’accident. S’agissant des rentes, le salaire que l’assuré a gagné durant l’année qui a précédé l’accident est déterminant pour le calcul. La LPGA impose au Conseil fédéral de fixer le montant maximum du gain assuré dans les assurances sociales qui allouent des prestations en espèces fixées en pour-cent du gain.
Dans le cas de la LAA, le Conseil fédéral doit veiller à ce que, en règle générale, au moins 92 %, mais pas plus de 96 % des travailleurs assurés soient couverts pour le gain intégral. Aujourd’hui, le montant maximum du gain assuré s’élève à 148 200 francs par an ou à 406 francs par jour.
Dans l’assurance facultative, le Conseil fédéral s’est écarté des règles susmentionnées en raison de cette différence fondamentale de statut entre salariés et indépendants. Selon son ordonnance, le montant du gain assuré pour les personnes exerçant une activité lucrative indépendante fait l’objet d’une convention entre l’assuré et l’assureur, dans les limites du montant du gain maximum assuré en vigueur dans l’assurance obligatoire. Le gain assuré fait donc partie des éléments essentiels du contrat d’assurance. Il est convenu à la conclusion du contrat et peut être modifié au début de chaque année civile. Les primes et les prestations sont ensuite calculées d’après ce gain assuré convenu.
Dans l’assurance facultative, le gain assuré convenu ne peut être inférieur à 45 % du montant maximum du gain assuré, soit aujourd’hui 66 690 francs. Pour les membres de la famille collaborant à cette activité, il ne peut être inférieur à 30 % de ce même montant, soit 44 460 francs. Ces taux ont été fixé de façon à garantir le financement des frais de traitements médicaux, qui sont indépendants du gain assuré.
Un seuil minimal d’accès à l’assurance facultative trop bas impliquerait par ailleurs une forte hausse des primes par rapport au revenu. Et un seuil trop haut aurait pour conséquence de compliquer la tâche des groupes professionnels à bas revenus, lesquels auraient du mal à s’offrir une couverture d’assurance appropriée. Cela les contraindrait à être surassurés parce qu’ils n’atteignent pas le niveau de revenu requis.