En un coup d’œil
- Une nouvelle étude montre que ces quatre dernières années, tous les cantons ont vu augmenter leur nombre de places en crèche, mais à des niveaux différents.
- Le nombre de places d’accueil parascolaire a été recensé pour la première fois en 2024.
- Les enfants de Suisse romande et des cantons plutôt urbains font plus souvent usage de cette offre que les enfants des autres cantons.
Dans une situation idéale, les parents devraient pouvoir répartir leur travail familial, domestique et professionnel comme ils le souhaitent (cf. Lüssi et Lütolf 2024). Avec le congé parental au début de la vie familiale, l’accueil extrafamilial pour enfants est l’élément clé de cette liberté de choix. Une étude commandée par la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) montre que davantage de places d’accueil sont disponibles dans le domaine préscolaire aujourd’hui qu’il y a quatre ans, tant en valeur absolue qu’en termes de taux d’accueil (Lüssi 2024).
Cependant, les différences entre les cantons sont importantes : alors qu’à Bâle-Ville, il y a une place de crèche pour deux enfants, ce taux est de 6 % dans le canton d’Appenzell Rhodes-Intérieures (voir carte 1). Il est frappant d’observer qu’en principe les cantons plutôt urbains et disposant de ressources importantes, comme Bâle-Ville, Genève, Zurich ou Zoug (cf. DFF 2024), comptent plus de places de crèche que les cantons structurellement moins développés, comme Appenzell Rhodes-Intérieures, Soleure et Glaris.
Au cours des quatre dernières années, le nombre de places d’accueil pour les enfants en âge préscolaire a augmenté dans tous les cantons. Les différences cantonales ne se sont toutefois pas atténuées, elles ont même parfois été accentuées.
L’accueil parascolaire suit un schéma légèrement différent. Outre les différences en termes d’urbanité et de ressources, le fossé entre régions linguistiques est criant : à Neuchâtel ou à Genève, plus d’un enfant sur deux est régulièrement pris en charge en dehors de l’école, alors que dans des cantons comme Nidwald ou Bâle-Campagne, c’est plutôt un écolier sur vingt (voir carte 2).
Financement : le canton de Bâle-Ville en tête
Pour la première fois, l’investissement des cantons (sans compter la participation des communes) dans l’accueil extrafamilial pour enfants a été relevé. Au total, les cantons ont dépensé près de 490 millions de francs par an en subventions pour l’accueil extrafamilial pour enfants pendant la période étudiée.
Les chiffres sont également très disparates : les contributions cantonales de Bâle-Ville et du Jura atteignent respectivement 2000 et 1500 francs par enfant et par an. En revanche, les cantons d’Argovie, de Bâle-Campagne, de Soleure, de Thurgovie, de Zoug et de Zurich ne prévoient pour l’instant aucune subvention cantonale. Conformément au principe de subsidiarité, ils laissent cette charge aux mains des communes (Vatter 2024), qui assument à leur tour cette tâche dans des proportions variables.
Le financement de l’accueil extrafamilial pour enfants présente un schéma similaire : les cantons suisses romands ainsi que les cantons plutôt urbains mettent plus de moyens financiers à disposition que les autres cantons.
On observe que les cantons investissent clairement plus dans le domaine préscolaire que dans le domaine parascolaire. Cela s’explique notamment par le fait que douze cantons prévoient dans leur base légale un subventionnement exclusivement dans le domaine préscolaire et seuls cinq cantons subventionnent totalement ou partiellement l’accueil parascolaire.
Disparités dans la collecte de données
La comparaison à l’échelle nationale est entravée par des instruments de mesure non uniformes : malgré une disponibilité généralement élevée des interlocuteurs cantonaux à fournir des informations, la collecte de chiffres comparables entre cantons s’est avérée difficile. Les cantons ont différentes notions et définitions de ce que sont les différentes formes d’accueil extrafamilial pour enfants. L’absence de statistiques et de vue d’ensemble des principaux éléments de l’accueil extrafamilial pour enfants dans plusieurs cantons empêche une vision claire. Il arrive que des indicateurs de base tels que le nombre de places offertes et le nombre d’enfants accueillis ne sont pas régulièrement collectés.
Afin de pouvoir effectuer un monitoring de l’accueil extrafamilial pour enfants à l’échelle nationale, il est urgent d’agir sur l’harmonisation des indicateurs de mesure, que ce soit au niveau horizontal par les cantons ou vertical par la Confédération. Dans le cadre des débats concernant l’initiative parlementaire sur l’accueil extrafamilial pour enfants (Remplacer le financement de départ par une solution adaptée aux réalités actuelles) – et dans le contexte de l’« initiative sur les crèches » qui a abouti – les deux chambres se penchent également sur cette problématique. Le Conseil fédéral et le Conseil national ont déjà demandé une statistique nationale sur l’accueil extrafamilial des enfants avec la collaboration des cantons.
Clarifier le rôle de la Confédération
Dans l’accueil extrafamilial pour enfants, il se développe actuellement une dynamique significative : les différences cantonales concernant l’offre, l’utilisation et le financement se sont accentuées ces quatre dernières années et reflètent assez fidèlement le schéma des barrières linguistiques. À l’instar des cantons francophones, les cantons plutôt urbains présentent une offre plus élevée (voir aussi OFS 2024 : p. 19 à 21). De plus, plusieurs cantons révisent leurs bases légales pour l’accueil extrafamilial et dans la plupart des cas, prévoient également une participation financière cantonale. De plus en plus de cantons collectent des données à ce sujet.
Il reste à définir pour la société les objectifs politiques à poursuivre dans le domaine du financement et du subventionnement de l’accueil extrafamilial pour enfants. La demande reprise par les milieux scientifiques et la société est celle d’un accueil extrafamilial pour enfants abordable et bien développé (cf. Hotz et al. 2024 ; Friedli 2024), afin que les couples puissent répartir leur travail familial, domestique et professionnel comme ils le souhaitent.
En outre, il convient de se poser la question de la compétence, notamment quelles fonctions la Confédération peut, doit et va assumer dans ce domaine politique (Häusermann et Bürgisser 2022). Outre le financement, le Parlement a actuellement la possibilité de s’engager plus activement dans la politique familiale, notamment concernant le suivi de l’accueil extrafamilial pour enfants.
Bibliographie
OFS (2024). Enquête sur les familles et les générations 2023. Premiers résultats .
DFF (2024). Péréquation financière nationale
Friedli, Daniel (2024). Das unheilige Krippenspiel. Neue Zürcher Zeitung am Sonntag, pages 22–23. 1er septembre.
Häusermann, Silja ; Bürgisser, Reto (2022). Familienpolitik. In : Papadopoulos, Yannis ; Sciarini, Pascal ; Vatter, Adrian ; Häusermann, Silja ; Emmenegger, Patrick ; Fossati, Flavia (dir.). Manuel de la politique suisse. p. 931 à 954.
Hotz, Anna; Gisiger, Jasmin; Bade, Stephanie (2024). Conciliation entre vie familiale et vie professionnelle : écart entre l’envie et la réalité. Sécurité sociale CHSS. 20 février.
Lüssi, Pierre (2024). Tour d’horizon de la situation de l’accueil extrafamilial et parascolaire dans les cantons. Étude commandée par la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS).
Lüssi, Pierre; Lütolf, Meret (2024). Un nouveau modèle familial comme référence pour la politique et la société. Sécurité sociale CHSS. 30 janvier.
Vatter, Adrian (2024). Das politische System der Schweiz.