En un coup d’œil
- Le Conseil fédéral soumettra probablement le projet E-ID au Parlement à l’automne.
- L’E-ID est l’équivalent électronique de la carte d’identité.
- L’E-ID sert de base pour d’autres moyens de preuve électroniques, par exemple dans la prévoyance vieillesse.
Le premier projet d’identité électronique a été massivement rejeté par référendum en mars 2021. Cependant, l’enquête réalisée auprès la votation a révélé qu’une majorité des votants était favorables à une E-ID, mais à condition que celle-ci soit délivrée et gérée par l’État.
Quelques jours après la votation, les six groupes parlementaires ont déposé des motions de teneur identique pour l’introduction d’une E-ID étatique fiable, motions adoptées ensuite par les deux chambres. Neuf mois plus tard, le Conseil fédéral a jeté les bases de la future E‑ID :
- Les utilisateurs de l’E‑ID devront, dans la mesure du possible, avoir la maîtrise de leurs données (principe de l’identité autosouveraine).
- La protection des données devrait être assurée notamment par le système lui-même (principe de protection de la vie privée dès la conception), mais aussi par la limitation des flux de données nécessaires (principe de l’économie des données) et une sauvegarde décentralisée des données.
- L’E-ID doit reposer sur une infrastructure de confiance gérée par l’État et qui permettra aussi à d’autres organismes publics et privés d’établir des moyens de preuve numériques.
Lors de la consultation, la plupart des retours ont été favorables. Le processus d’émission a notamment fait l’objet de critiques : parallèlement à l’émission sur un guichet en ligne, l’E-ID devrait également pouvoir être obtenue à un guichet physique. Dans le domaine de la protection des données, des mesures ont notamment été exigées contre l’identification à outrance, c’est-à-dire les demandes disproportionnées de consultation de données.
Début des travaux préparatoires
Le Conseil fédéral devrait soumettre le projet au Parlement en automne 2023. Parallèlement, il mène des travaux préparatoires pour la mise en place de l’infrastructure de confiance, et ce pour deux raisons principales. Tout d’abord, cette façon de procéder permet un ajustement permanent de la technique et du droit. Même si, du point de vue des utilisateurs, les fonctionnalités décrivent des opérations banales, elles nécessitent de créer des bases légales, de revoir les processus, de mettre à disposition des instruments techniques et de restructurer les organisations.
Ensuite, cela permettra de lancer l’E-ID très peu de temps après l’entrée en vigueur de la loi, qui devrait intervenir au plus tôt courant 2025.
Certains travaux pourraient être entrepris dès aujourd’hui. Ainsi, de premières expériences concrètes pourraient être réalisées dans le cadre du « sandbox public de l’infrastructure de confiance ». Le sandbox est un environnement test mis à disposition par l’Office fédéral de l’informatique et de la télécommunication (OFIT) : il permet aux autorités et aux particuliers d’émettre leurs propres moyens de preuve et de les associer à leurs processus. Des travaux préparatoires pourraient également être entrepris en vue de standardiser le contenu des différents moyens de preuves numériques souhaitées. Au printemps 2023, l’Administration numérique suisse, mise en place par la Confédération et les cantons, a lancé à cet effet un premier groupe de travail réunissant des représentants des cantons.
Comment fonctionne l’E-ID ?
L’E-ID, délivrée par l’État, est l’équivalent électronique de la carte d’identité, du passeport ou du titre de séjour. Une demande d’E-ID ne peut être déposée que si la personne dispose déjà d’une pièce d’identité délivrée par une autorité suisse. L’E-ID est gratuite pour les utilisateurs. Les mineurs auront également le droit d’obtenir une E-ID, sur demande de leur représentant légal. La possession d’une E-ID est facultative.
L’E-ID fonctionne de la même façon que la carte d’identité, son pendant physique : elle est également délivrée par l’Office fédéral de la police (Fedpol). Les utilisateurs conservent leur E-ID dans un portefeuille électronique (wallet), généralement sur leur smartphone. Lorsqu’une personne présente son E-ID, ce processus se déroule exclusivement entre elle et la personne qui vérifie le document, comme pour la carte d’identité. L’authenticité et la validité de l’E-ID peuvent être vérifiées au moyen d’une interrogation du registre ; l’émetteur de l’E-ID n’est pas informé de cette interrogation.
Selon les objectifs d’open finance fixés par le Conseil fédéral, l’infrastructure informatique doit également être accessible à d’autres autorités publiques et aux particuliers pour l’émission d’autres moyens de preuve électroniques. Un écosystème de moyens de preuves électroniques peut ainsi être mis en place. Les possibilités d’application sont illustrées ici par quelques exemples concrets d’utilisation de l’E-ID dans le domaine de la prévoyance vieillesse :
- Extrait du CI (AVS) : aujourd’hui, les personnes soumises à l’AVS peuvent obtenir un extrait de leur compte individuel (CI). Celui-ci leur est généralement envoyé par courrier postal. L’E-ID, qui contiendra également le numéro AVS, permettra de demander un extrait du CI par voie électronique puis de le recevoir directement dans son portefeuille comme moyen de preuve électronique. Dans un deuxième temps, un couple pourrait par exemple présenter les extraits de leurs CI respectifs pour le calcul anticipé de leur rente AVS. Comme ces extraits du CI sont des paquets de données structurés, le calcul anticipé pourrait être effectué de manière automatique, du moins pour les cas simples.
- Certificat de prévoyance (LPP) : tout comme pour l’extrait du CI, l’E-ID permettrait d’obtenir un certificat de prévoyance LPP comme moyen de preuve électronique. Ce certificat et l’extrait du CI pourraient ensuite être soumis à un prestataire de services financiers pour une analyse de la situation en matière de prévoyance professionnelle. En l’occurrence, c’est surtout le potentiel pratique d’automatisation sur la base de données clairement structurées qui prime. L’authenticité de l’extrait passe au second plan.
- Extrait de compte du pilier 3a : l’E-ID permettrait également d’établir un extrait de compte du pilier 3a comme moyen de preuve électronique. Ce document électronique pourrait ensuite être joint à la déclaration d’impôt, pour autant que les autorités fiscales aient pris les mesures techniques nécessaires.
Dans ces trois exemples, ce sont toujours les utilisateurs qui demandent les moyens de preuve, qu’ils conservent ensuite dans leur portefeuille électronique. Et ils peuvent décider eux-mêmes à qui ils transmettent ces documents.